Qui sont les smombies ?
Néologisme apparu en fin d’année 2015, le terme « smombies » est la contraction de smartphone et de zombies. Il désigne toute personne pour qui l’utilisation de son téléphone mobile est obsessionnelle au point de faire totalement abstraction de son environnement et du respect de la sécurité routière. En situation de mobilité, ce n’est pas sans risque pour elle-même comme pour les personnes ou les véhicules qu’elle croise dans la rue.
Smombies : un état des lieux alarmant
Désormais, des millions de piétons tous âges confondus circulent dans les rues de nos villes, partout dans le monde, en continuant d’utiliser leur téléphone portable. Or, les SMS, les MMS qu’ils reçoivent ou qu’ils envoient, la musique qu’ils écoutent et les jeux vidéo sont devenus une addiction qui les absorbent totalement. Ce faisant, ils en oublient les dangers qui les entourent ce qui les rend vulnérables aux collisions. En effet, selon une étude récente, près d’un tiers des utilisateurs de smartphones répondent à des appels téléphoniques ou envoient des SMS en marchant.
Ainsi, sans contact visuel avec leur environnement et en plein « effet tunnel », ils peuvent au mieux se blesser en percutant une personne ou un mobilier urbain en marchant. Au pire, ils peuvent perdre la vie en se faisant renverser par un véhicule lorsqu’ils traversent la rue par manque d’attention.
Les résultats de l’étude DEKRA
Le centre de recherche en accidentologie de la société DEKRA a mené une étude auprès de 6 capitales européennes (Amsterdam – Berlin – Bruxelles – Paris – Rome – Stockholm). Les résultats issus de l’observation terrain montrent que les piétons sont de plus en plus distraits. Cela tient au fait qu’ils consultent en permanence leur téléphone mobile. En conséquence, les risques d’accidents en milieu urbain s’en trouvent considérablement augmentés.
Des résultats inquiétants
Ainsi, plus de 8 % des personnes observées ont traversé la rue en envoyant un SMS. 14,5 % n’ont pas même levé les yeux pour vérifier qu’elles pouvaient le faire sans danger. A Berlin, à Bruxelles et à Rome, ce sont 17 % des 14 000 piétons observés qui présentent un tel comportement à risque. A Stockholm, on atteint même les 23,6 %. Et d’une manière générale, ce sont les jeunes urbains qui se révèlent être les plus impactés.
Pour ce faire, les relevés réalisés par DEKRA ont eu lieu à des intersections fréquentées ainsi qu’à des passages piétons situés près du centre-ville. Ils l’ont été également à des arrêts de transport public et près des gares. En effet, dans ces lieux, on enregistre les niveaux de densité piétons les plus élevés. De ce fait, le phénomène n’a plus rien d’anecdotique et doit faire l’objet d’une prise en compte sérieuse.
Les chiffres sont d’autant plus inquiétants qu’un décès sur dix est causé par le comportement inapproprié de ces piétons. Aujourd’hui, les statistiques concernant les accidents montrent que près de 22 % des personnes qui meurent au cours d’accidents de la circulation dans l’Union européenne sont des piétons. La plupart de ces accidents se situent dans les villes.
Recommandations des experts de DEKRA
Les experts de DEKRA recommandent que le piéton, lorsqu’il se trouve dans la circulation routière, accorde une attention sans faille au trafic pour préserver sa propre sécurité. En effet, le risque est plus élevé car le piéton est un utilisateur routier non protégé contrairement à un automobiliste. Ainsi, la distraction causée par l’utilisation des smartphones ne doit donc pas être sous-estimée.
Cette question fait partie des thèmes développés par DEKRA dans son rapport européen sur la sécurité routière. Doit-on s’orienter vers l’interdiction d’utiliser les mobiles dans la rue ? Sans aucun doute, une telle mesure s’avèrerait des plus impopulaires. Pourtant, l’étude DEKRA fournit des éléments qui confortent cette position.
Quelques innovations urbaines et actions pour y remédier
Face à un tel constat, de nombreuses villes à travers le monde ont pris la décision d’engager des actions spécifiques. De même, elles ont lancé des innovations urbaines pour tenter de modifier ces comportements dangereux. A défaut de les faire cesser, il s’agit du moins de les prévenir et mieux de les encadrer.
Ville de Séoul (Corée du sud)
Séoul a, la première, lancé l’offensive avec la pose de nouveaux panneaux de signalisation triangulaires jaunes entourés de rouge. Afin de mettre en garde les automobilistes, ils montrent deux personnes penchées sur un smartphone. Dans la foulée, Stockholm a adopté cette nouvelle signalétique.
Augsbourg et Cologne (Allemagne)
A Augsbourg et également à Cologne, des rangées de LED installées sur la chaussée le long des trottoirs près des lignes de tramway tiennent compte de la position tête baissée des « smombies ». Il s’agit d’une expérimentation dont l’objectif consiste à alerter les piétons en émettant une lumière rouge clignotante à l’approche du tramway. Si ce dispositif s’avère efficace, il fera l’objet d’un déploiement plus large.
Belgique, Stockholm (Suède), Suisse et Chongqing (Chine)
En Belgique ainsi qu’à Stockholm, en Suisse et à Chongqing, le trottoir comporte deux parties séparées pour isoler les « smombies » des autres piétons afin d’éviter qu’ils ne se percutent.
Quant à elle, la prévention routière de la police de Lausanne a choisi de tourner un spot télé intitulé « Anastase : le tour de magie ». Il privilégie l’humour noir pour faire passer un message fort auprès des « smombies » sur les risques encourus.
État du New Jersey (États-Unis)
Aux États-Unis, il n’en va pas de même car le nombre d’accidents impliquant des « smombies » a triplé ces dix dernières années. C’est pourquoi, certains états comme le New Jersey appliquent désormais une amende à tout contrevenant qui regarde son smartphone plutôt que son chemin ou la rue qu’il traverse.
En conclusion
Pour autant, cela ne règle en rien la cause du problème. En effet, les intéressés continuent à utiliser leur smartphone dans la rue sans rien changer à leur comportement. De ce fait, comme le code de la route interdit l’alcool au volant, ne faudrait-il pas émettre des règles visant à sansctionner le non-respect de la vigilance sur la voie publique et faciliter leur appropriation ? A ce titre, l’éducation reste la meilleure des protections selon Thierry Baccino, professeur de psychologie cognitive des technologies numériques à l’université Paris 8 et directeur scientifique du Laboratoire des Usages en Technologies d’Information Numérique (LUTIN). Il est donc peut-être nécessaire de sensibiliser les jeunes à l’usage responsable des smartphones et tablettes et à leurs conséquences.